Qu’est-ce que l’obligation d’usage de la marque ?
C’est une règle qui impose au titulaire d’une marque, au-delà d’un certain délai, d’utiliser sa marque. A défaut d’usage, sa marque peut être déchue en justice sur demande des tiers. Voyez à ce sujet notre fiche pratique sur la déchéance pour non usage.
Pourquoi une obligation d’usage de la marque ?
Les règles sur l’obligation d’usage ont deux raisons d’exister :
- d’abord, elles permettent aux titulaires de marques de bénéficier d’un délai de 5 ans (cf ci-dessous) pour commencer l’exploitation de leur marque. En effet, il n’est pas évident pour tous les déposants d’exploiter leur marque dès le dépôt. Parfois, on la dépose à titre conservatoire pour une exploitation future (le temps de monter une société ou de fabriquer sa première production, par exemple).
- par ailleurs, elles permettent d’éviter qu’un titulaire de marque, qui ne l’exploiterait pas, ne monopolise un nom et puisse l’opposer aux tiers de façon illimitée.
A partir de quand une marque est-elle soumise à obligation d’usage ?
Une marque française ou communautaire est soumise à une obligation d’usage au terme d’un délai de 5 ans à compter de la date de publication de son enregistrement (à ne pas confondre avec sa date de dépôt).
Par exemple, une marque déposée le 1er août 2014 et enregistrée le 15 janvier 2015 ne sera soumise à obligation d’usage qu’à compter du 15 janvier 2020.
Durant ce délai de 5 ans, la marque peut être opposée à des tiers sans avoir besoin d’en prouver l’usage.
Dès lors, si vous attaquez un tiers via une procédure d’opposition ou une action en justice, vous pouvez le faire même si vous n’utilisez pas la marque : l’adversaire ne pourra pas soulever comme argument le fait que vous ne l’utilisez pas. Il ne peut valablement vous demander de soumettre des preuves d’usage.
Quelles sont les conséquences de l’obligation d’usage ?
Une fois que la marque est soumise à obligation d’usage, vous ne pouvez plus l’opposer si facilement aux tiers. En effet, si vous attaquez un tiers qui aurait déposé ou utilisé une marque identique ou proche de la vôtre, ce dernier est en droit de vous demander de fournir des preuves d’usage de votre marque. Si vous ne pouvez pas en produire :
- Devant l’INPI ou l’EUIPO, dans le cadre d’une procédure d’opposition : la procédure est clôturée sans même étudier le fond.
- Devant le TGI, au cours d’une action en justice : le juge prononce directement la déchéance de la marque et l’action est rejetée. Tel est pris qui croyait prendre ! Attention donc à n’appuyer vos demandes que sur des marques utilisées.
Important : les seules preuves acceptables seront celles qui démontreront un usage dans les 5 ans précédant le début de la procédure.
Par exemple, votre marque a été enregistrée le 15 mai 2008. Un adversaire vous demande de soumettre des preuves d’usage dans une procédure qui a démarré le 28 juillet 2015. Vous devez soumettre des preuves d’usage qui datent de la période comprise entre le 28 juillet 2010 et le 28 juillet 2015.
Si la marque n’a pas été exploitée au cours des 5 années précédant le début de la procédure, alors la déchéance pour non usage peut être demandée. Cf notre fiche pratique à ce sujet.
Quelles sont les preuves d’usage acceptées ?
Tout d’abord, les preuves d’usage sont des documents datés qui permettent de déterminer que la marque a été utilisée au cours des 5 dernières années.
Les preuves d’usage peuvent être des factures individualisant clairement les produits, des publicités parues dans des magazines, des revues de presse… Les données chiffrées telles que le chiffre d’affaire de la société, les volumes de vente et le montant des dépenses publicitaires sont également importantes.
L’essentiel est de faire état d’un usage sérieux, c’est à dire d’un usage commercial (et non seulement interne à l’entreprise) étendu, volumineux et fréquent. Si la marque n’a été utilisée que sur une très courte période, voire pour un seul événement, il y a de fortes chances pour que l’usage sérieux ne soit pas retenu.
L’importance pratique de l’obligation d’usage
- En défense dans une procédure : demander des preuves d’usage à un adversaire qui vous attaquerait ne coûte rien, et peut permettre de mettre fin prématurément à la procédure si ce dernier a été négligent (il n’a pas fait d’usage sérieux de sa marque, il n’a pas conservé de bonnes preuves d’usage…).
- Dans le cadre d’une recherche de disponibilité effectuée préalablement au dépôt d’une marque : si vous relevez une marque antérieure gênante, prenez le temps de regarder sa date d’enregistrement. Si elle est enregistrée depuis plus de 5 ans, approfondissez votre recherche et essayez de savoir si elle a été utilisée ou non dans les 5 dernières années. Si ce n’est pas le cas, alors les risques qu’elle représente pour votre projet sont largement amoindris. Pour en savoir plus sur les recherches de disponibilité, consultez notre fiche pratique à ce sujet.