Les contrefaçons de Jeff Koons
L’artiste contemporain est actuellement au cœur de la tourmente à cause d’un cochon. En effet, lors d’une rétrospective au Centre Pompidou en 2014, Jeff Koons avait exposé une sculpture représentant un cochon surplombant une jeune femme brune allongée. Cette œuvre était inspirée d’une publicité de la marque Naf-Naf, où l’animal venait au secours d’une femme prise dans une avalanche. Le créateur de la publicité Naf-Naf a donc porté plainte contre l’artiste, sa société et le musée.
Le TGI reconnaît la contrefaçon de la publicité Naf-Naf
Franck Davidovici, concepteur de la publicité « Fait d’hiver » pour Naf-Naf en 1985, avait assigné l’artiste ainsi que le Centre Pompidou pour obtenir des dommages-intérêts. Selon lui, la sculpture de Koons est une « copie servile » de la publicité Naf-Naf. L’artiste s’est défendu en arguant qu’il s’était uniquement inspiré de celle-ci. A ce titre, il souligne les différences entre les deux œuvres (et notamment la présence d’un pingouin ainsi que la tenue de la jeune femme). Son avocat a également invoqué l’exception de parodie.
Le tribunal de grande instance de Paris a suivi le raisonnement de Franck Davidovici. Jeudi 8 novembre, l’artiste, sa société et le Centre Pompidou ont été condamnés à verser solidairement 135.000 euros de dommages et intérêts au publicitaire. Cette somme ne représente que peu de choses pour la société de Jeff Koons, d’autant plus que la sculpture ayant été réalisée en 1988, elle avait déjà été exposée à de nombreuses reprises.
Jeff Koons, un habitué des contrefaçons
Ce n’est pas la première fois que l’artiste est accusé de plagiat. En 1992, l’artiste avait été condamné pour une affaire identique. Cette fois, il n’était pas question de cochon mais de chiots. Dans sa sculpture « String of Puppies », l’artiste avait repris tous les éléments d’une photographie prise par Art Rogers.
Les différences minimes ajoutées par Jeff Koons n’ont pas suffi ici non plus à écarter la contrefaçon. Le tribunal de New-York avait estimé que ni la renommée de Jeff Koons ni le prix très élevé de ses œuvres ne devaient faire oublier qu’il s’agissait d’une « copie délibérée » condamnable.
En 2014, lors de la fameuse rétrospective du Centre Pompidou, Jeff Koons avait également été accusé de contrefaçon pour sa sculpture « Naked ». Il s’agissait ici encore d’une reprise quasiment à l’identique d’une photographie, prise en 1975 par Jean-François Bauret. La sculpture n’avait finalement pas été exposée au musée, mais le TGI avait condamné l’artiste contemporain. En effet, la sculpture avait été reproduite dans le catalogue et les supports de l’exposition. Pour les juges, les variations entre les deux œuvres sont minimes, et « n’empêchent pas de reconnaître et d’identifier les modèles et la pose ». Il s’agit donc bien d’un plagiat.
Inspiration ou contrefaçon. Où est la limite ?
Il arrive également que Jeff Koons s’en sorte. En 2006, il a ainsi gagné un procès qui l’opposait à la photographe Andrea Blanch. Celle-ci l’accusait d’avoir repris une publicité de la marque Gucci pour l’intégrer dans son œuvre « Niagara ». Cette fois, le juge a estimé que Niagara était une œuvre nouvelle, basée sur la photographie d’Andrea Blanch. En outre, pour la Cour, cette publicité n’était pas assez originale pour bénéficier de la protection du droit d’auteur.
Jeff Koons reste ainsi un habitué des tribunaux, une partie importante de ses œuvres étant « inspirées » par des photographies antérieures. La difficulté principale est qu’il ne suffit pas d’ajouter quelques fleurs pour créer une nouvelle œuvre. En effet, même une petite quantité de ressemblances peut constituer une contrefaçon. Contrairement à une idée répandue, selon laquelle « 20% de différences » sont nécessaires pour écarter un plagiat, il n’existe pas de limite précise. Le juge détient le pouvoir d’appréciation.
Pour en savoir plus sur la contrefaçon, notre équipe est à votre disposition.