juin 6

Le dépôt compliqué de la marque SIMPLISSIME

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Le dépôt compliqué de la marque SIMPLISSIME

 

Comme la plupart des maisons d’édition, Hachette protège ses droits de propriété intellectuelle, et détient à ce titre de nombreuses marques. Celles-ci correspondent à des titres d’ouvrages ou de magazines, à des personnages, à des événements mais aussi à des collections. Ainsi, en 2015, à l’occasion du lancement d’une collection de livres de recettes faciles et rapides à réaliser, Hachette a déposé la marque « SIMPLISSIME ». Mais ce dépôt n’a pas été aussi simple que prévu.

 

Refus de l’INPI : la marque SIMPLISSIME n’est pas distinctive

En 2017, l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) rejette la demande de marque. Selon l’examinateur, SIMPLISSIME n’est pas une marque distinctive. En effet, la distinctivité est une des conditions de validité des marques. Pour être distinctive, une marque doit permettre de différencier les produits ou services d’une entreprise de ceux d’une entreprise concurrente. A l’inverse, les marques descriptives (qui évoquent fortement les produits ou services visés dans le dépôt) ne sont pas distinctives. L’INPI refusera de les enregistrer. En effet, les termes considérés comme descriptifs sont des termes qui doivent rester disponibles pour l’ensemble des opérateurs du marché.

Dans cette affaire, l’INPI a considéré que la marque SIMPLISSIME ne remplissait pas ce rôle essentiel d’identification des produits visés. En effet, la marque est composée du mot « simple » et du suffixe superlatif « issime ». Le terme SIMPLISSIME qui en résulte apparaît donc plus comme un argument de vente à caractère laudatif. Dès lors, l’INPI refuse d’enregistrer la marque SIMPLISSIME, qui sera, selon lui, perçue par le public comme vantant les mérites des produits et non comme une garantie de leur origine commerciale.

En mai 2018, Hachette forme un recours contre cette décision.

 

Hachette défend sa marque SIMPLISSIME

Lors de son recours devant la Cour d’Appel de Versailles, Hachette a fait valoir les arguments suivants :

  • La marque serait distinctive car elle comporte des éléments graphiques.
  • La dénomination SIMPLISSIME serait uniquement évocatrice. Elle véhiculerait un aspect irréaliste. A ce titre, le consommateur la perçoit comme humoristique ou décalée.
  • Enfin, la marque SIMPLISSIME aurait acquis un caractère distinctif du fait de son usage.

Il est en effet admis que les marques faiblement distinctives peuvent être enregistrées sous forme semi-figurative (les éléments graphiques permettant de renforcer la distinctivité). En outre, les marques évocatrices ont longtemps bénéficié d’un traitement assez favorable devant l’INPI. Contrairement aux marques descriptives, le caractère « évocateur » ne constituait pas un obstacle à l’enregistrement. Ces marques restaient cependant très difficiles à défendre lors d’un conflit.

Enfin, l’article L. 711 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) dispose que : « le caractère distinctif peut […] être acquis par l’usage ». C’est le cas lorsque le public perçoit la marque comme indication d’origine, alors même que la marque est faiblement distinctive. Ainsi, la marque VENTE-PRIVEE était devenue distinctive après son dépôt.

Cour d’appel de Versailles : pas de marque SIMPLISSIME pour Hachette

Le 9 octobre 2018, la Cour d’Appel de Versailles a rendu sa décision sur la marque SIMPLISSIME. Selon les juges, le terme SIMPLISSIME qualifie « quelque chose [de] tellement simple et commode d’utilisation ». Ce faisant, la marque ne remplit pas son rôle d’indicateur d’origine.

La Cour estime en outre que les éléments graphiques sont insuffisants pour renforcer la distinctivité de la marque : « la police de caractères légèrement stylisée, l’ajout d’une couleur ou une forme géométrique simple ne peuvent faire échapper un terme non distinctif au rejet de l’enregistrement ».

Enfin, la Cour rappelle que « l’acquisition du caractère distinctif d’un signe par l’usage doit être apprécié au jour du dépôt ». Hachette n’ayant fourni que des preuves d’usage postérieures au dépôt de la marque, celles-ci n’ont pas été considérées comme suffisantes par les juges.

La marque SIMPLISSIME a donc été intégralement rejetée. Toutefois, Hachette ne s’avoue pas vaincue. La maison d’édition a ainsi procédé à un nouveau dépôt de la marque SIMPLISSIME le 7 mars 2019. Cette fois-ci, la société Hachette compte sur l’acquisition du caractère distinctif par l’usage, la collection SIMPLISSIME étant bien connue du public français.

 

En conclusion, il faut retenir qu’un dépôt de marque n’est pas toujours simplissime et qu’un accompagnement professionnel peut être très utile !


Tags

descriptivité, distinctivité, Hachette, INPI, marque descriptive, marque distinctive, marque évocatrice, Simplissime


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