A la fin de l’année 2023, le personnage phare de Disney, Mickey Mouse, tombera dans le domaine public aux Etats-Unis. Nous vous expliquons la signification et les conséquences de ce changement.
Mais avant de rentrer dans le détail, il est important de bien comprendre le concept de « copyright ». En effet, le copyright américain est généralement confondu avec les droits d’auteurs dans le langage courant, alors que ces notions diffèrent sur plusieurs aspects.
Différences entre droit d’auteur et copyright
Copyright et droit d’auteur sont souvent confondus, notamment car ils visent à protéger les mêmes œuvres (des créations originales comme des livres, des films, etc.). Mais ces deux concepts présentent toutefois des différences importantes, qui sont liées à leurs objectifs. Le droit d’auteur français (mais que l’on retrouve dans la plupart des pays européens) tend, comme son nom l’indique, à protéger l’auteur (la personne qui crée l’œuvre). Le copyright anglo-saxon se focalise sur l’exploitation économique de l’œuvre.
Ainsi, le copyright protège les personnes qui investissent dans la création intellectuelle (ex : les employeurs, les producteurs) contrairement au droit d’auteur qui s’attache davantage aux auteurs des œuvres.
Par exemple, aux Etats-Unis, le titulaire du copyright sur une œuvre audiovisuelle sera automatiquement le producteur, qu’il s’agisse d’une personne physique ou d’une société de production. L’auteur d’un film change ainsi en fonction de la vente des catalogues. Cette logique ne s’applique pas en matière de droit d’auteur : le producteur devra se faire céder les droits par le ou les auteur(s) ayant participé au film. Il sera nécessaire de faire un contrat écrit.
En outre, les régimes du copyright et du droit d’auteur présentent un certain nombre de différences, notamment la durée de protection : 95 ans à compter de la publication de l’œuvre pour le copyright, 70 ans à compter de la mort de l’auteur en droit d’auteur français. En outre, si ces deux droits peuvent exister du seul fait de leur création (sans qu’aucune formalité ne soit nécessaire), il est généralement recommandé de procéder à un dépôt de copyright auprès d’un Office de propriété intellectuelle. Certaines actions (comme la contrefaçon) nécessitent en effet d’avoir un titre enregistré.
Enfin, il faut noter que le copyright n’existe que dans les pays de « Common Law » comme les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Inde, l’Australie ou encore le Canada. Il est soumis à des règles spécifiques, notamment l’usage des mentions « copyright » ou du symbole ©. En dehors de ces territoires, l’apposition du symbole © n’a aucune valeur juridique. Pour en savoir plus sur cette question, nous vous invitons à consulter notre article sur les différents symboles (®, TM et ©).
La bataille de Disney pour prolonger ses droits sur Mickey
L’image de la souris créée en 1928 par Walt Disney en personne est protégée par le copyright aux Etats-Unis, et dans d’autres pays.
1928 : naissance du personnage de Mickey
La naissance du personnage de Mickey est associée à la sortie en 1928 du dessin animé en noir et blanc Willie, Le Bateau à Vapeur ou Steamboat Willie, qui a fait connaître Mickey au monde entier. Après avoir bénéficié d’un monopole pendant 95 ans, le copyright s’achèvera à la fin de l’année 2023, et l’œuvre tombera dans le domaine public.
Cela signifie que ce dessin animé pourra être librement diffusé et que les personnages de cette œuvre, notamment Mickey, pourront être utilisés sans autorisation de la part de Disney.
L’intérêt pour Disney du copyright sur Mickey
Les droits de propriété intellectuelle dont dispose la société Disney sur le personnage de Mickey lui permettent de maîtriser son utilisation et son image, ainsi que de toucher d’importants revenus. En effet, le copyright confère à son bénéficiaire un certain nombre de droits sur l’exploitation de l’œuvre – mais ce monopole prend fin lorsque le copyright tombe dans le domaine public. A ce jour, il est encore nécessaire de bénéficier de l’autorisation de Disney en cas d’utilisation de l’image de Mickey pour un jeu vidéo, un tee-shirt, un restaurant, etc.
La société Disney protège d’ailleurs activement ses droits. Dans les années 1970, un dessinateur de BD américain avait utilisé l’image de la fameuse souris dans plusieurs planches, sans autorisation. Il avait finalement dû verser près de 200 000 dollars à Disney. En 2014, Disney a également attaqué le DJ canadien Deadmau5 qui avait déposé dans une trentaine de pays un logo proche du sien :
Les chiffres expliquent cette réaction : le magazine Forbes estime que la souris rapporterait chaque année 5,8 milliards de dollars à Disney.
L’influence de Disney sur la loi américaine relative au copyright
Il est difficile de se séparer de sa poule aux œufs d’or. La société Disney l’a bien compris et a exercé pendant des années un très fort lobbying auprès du législateur américain afin de maintenir des droits exclusifs sur le personnage de Mickey le plus longtemps possible.
Initialement, Mickey aurait dû tomber dans le domaine public en 1984, car à l’époque la durée de protection associée au copyright était de 56 ans seulement. Dès les années 1970, la société Disney a commencé une opération de lobbying auprès du Congrès américain, en arguant du fait que la durée du copyright américain devait être rapprochée de celle du droit d’auteur européen (de 70 ans). Cet argument a été entendu et un nouveau Copyright Act a été voté en 1976, portant la durée de protection à 75 ans.
Le copyright sur Mickey devait donc être maintenu jusqu’en 2003. A nouveau, le comité d’action politique de Disney a été très actif et a mené des actions de sponsoring à la fin des années 1990, si bien que le Congrès a de nouveau voté une extension du copyright à 95 ans, surnommée avec dérision le « Mickey Mouse Protection Act » (= « la loi Mickey »).
Il semble cependant que cette fois, la durée du copyright ne sera pas prolongée. La célèbre mascotte devrait bien tomber dans le domaine public fin 2023. Toutefois, la société dispose de moyens juridiques de défense malgré ce changement.
2023 : fin du copyright – quelles conséquences pour Disney ?
Fin de la protection par copyright du personnage de Mickey
Il est fondamental de noter que seule la version originale du personnage de Mickey présente dans le court-métrage de 1928 tombera dans le domaine public cette année. Disney détiendra toujours des droits sur les versions ultérieures, celle avec des gants blancs par exemple, que Mickey ne portait pas initialement. Or, « au fil des ans, Mickey Mouse a subi plusieurs transformations de son apparence physique et de sa personnalité. Dans ses premières années, l’espiègle et malicieux Mickey ressemblait davantage à un rat, avec un long nez pointu, des yeux noirs, un corps de petite taille avec des jambes grêles et une longue queue », explique le Musée national d’histoire américaine.
Disney conserve un arsenal juridique fort
Par ailleurs, Disney reste protégée par le droit des marques. La société est titulaire de plusieurs marques qui comportent le personnage de Mickey, notamment le logo officiel des Walt Disney Animation Studios sur lequel figure Mickey depuis 2007, lui-même protégé par une marque déposée. Or, contrairement au copyright, la durée de protection d’une marque est en théorie illimitée, car une marque est indéfiniment renouvelable.
Grâce à la protection offertes par ses marques, Disney peut par exemple interdire l’utilisation commerciale d’un autre personnage nommé Mickey Mouse.
Disney dispose donc encore de moyens juridiques pour défendre son personnage iconique et son univers.
Si vous souhaitez en savoir plus sur le droit d’auteur (ou le copyright), n’hésitez pas à nous contacter.