janvier 8

La procédure d’opposition

0  comments

Qu’est-ce que la procédure d’opposition ?

La procédure d’opposition est une procédure administrative qui permet au titulaire d’une marque antérieure d’empêcher un tiers d’enregistrer une marque identique ou proche de la sienne, sans avoir à passer devant les tribunaux.

La procédure d’opposition se fait devant un office national (ex : l’INPI en France) ou régional (ex : l’EUIPO en Union Européenne) de marques.

Qui peut former opposition ?

En général, les procédures d’opposition sont formées par les titulaires d’un droit antérieur (par exemple, le titulaire d’une marque enregistrée) ou par leur représentant.

La procédure d’opposition en France est également ouverte :

  • aux collectivités territoriales en cas d’atteinte au nom, à l’image ou à la renommée de la collectivité territoriale.
  • aux organismes de défense et de gestion d’une indication géographique (IP) déposée auprès de l’INPI et portant sur un produit industriel ou artisanal, en cas d’atteinte portée à cette IP
  • au directeur de l’INAO (Institut National de l’Origine et de la qualité) en cas d’atteinte au nom, à l’image ou à la réputation d’une AOC, d’une AOP, d’une IGP ou d’une IG portant sur des boissons spiritueuses.

Il faut noter qu’il est parfois obligatoire de passer par un mandataire agréé :

  • lorsque l’opposition est formée sur la base d’une marque en cotitularité (avec plusieurs propriétaires)
  • lorsque l’opposant n’est pas domicilié dans un État membre l’Espace économique européen.

Contre quoi peut-on former opposition ?

Contre une demande de marque postérieure. Par « postérieure », on entend une marque dont la date de dépôt arrive après la naissance d’un droit dont vous seriez titulaire.

On ne peut pas former opposition contre une marque qui est utilisée sans avoir été déposée, ni contre un autre signe qu’une marque (dénomination sociale, nom commercial, nom de domaine…). Pour agir contre ces usages, il est généralement nécessaire de saisir un tribunal.

Sur quelle base peut-on former opposition ?

Jusqu’en 2019, seul le titulaire d’une marque antérieure pouvait former une opposition devant l’INPI. Il n’était pas possible d’agir sur la base d’une marque non-déposée, ou d’une dénomination sociale.

Depuis 2020, et la réforme de la procédure d’opposition, il est possible au titulaire d’un des droits suivants de former opposition contre une demande de marque :

  • une marque (marque française, marque européenne, marque internationale…)
  • une dénomination ou d’une raison sociale
  • un nom commercial, une enseigne ou encore un nom de domaine (si leur portée n’est pas seulement locale).

Outre les droits mentionnés précédemment, il est possible d’invoquer d’autres droits antérieurs lors d’une action devant l’EUIPO: une marque notoire non enregistrée (mais il faudra prouver la notoriété), ou encore tout autre signe utilisé dans la vie des affaires, ayant une portée nationale, un nom de domaine, un modèle, un droit d’auteur…

En résumé, les personnes qui exploitent un signe dans la vie des affaires peuvent former opposition contre une demande de marque. Attention toutefois, il faut que le signe soit exploité / déposé sur le territoire où l’on va former l’opposition. Ainsi, si l’on est titulaire d’une marque française, on peut former opposition devant l’INPI (en France) et devant l’EUIPO (pour l’UE). Mais il ne sera pas possible d’agir à l’encontre d’une demande de marque italienne ou espagnole.

Dans quels délais ?

En France, le délai d’opposition est de deux mois à compter de la publication de la demande de marque litigieuse.

Exemple : la marque française qui vous gêne est déposée le 10 août 2021. Elle est publiée le 15 septembre 2021. Vous avez jusqu’au 15 novembre 2021 pour former opposition.

En Union Européenne, le délai d’opposition est de trois mois à compter de la publication de la demande de marque litigieuse.

Exemple : la marque européenne qui vous gêne est déposée le 16 janvier 2022. Elle est publiée le 28 février 2022. Vous avez jusqu’au 28 avril 2022 pour former opposition.

Quelle est la procédure à suivre ?

Il faut identifier l’office compétent (si la marque qui vous gêne est une marque française, l’opposition aura lieu devant l’INPI) puis remplir le formulaire d’opposition en ligne, et payer les taxes correspondantes. Le tout doit être envoyé au plus tard le dernier jour du délai d’opposition.

NB : en France, depuis la réforme de 2020, il est possible de soumettre le mémoire d’opposition (les arguments qui établissent l’existence d’un risque de confusion entre votre droit antérieure et la marque que vous souhaitez contester) dans le mois suivant la fin du délai d’opposition. Mais l’opposition ne sera notifiée au déposant de la marque attaquée qu’une fois la procédure achevée.

Exemple : vous avez jusqu’au 15 novembre 2021 pour former opposition contre la marque française qui vous gêne. Vous déposez votre formulaire et payer les taxes le 14 novembre. Vous avez jusqu’au 15 décembre 2021 pour envoyer votre mémoire d’opposition à l’INPI. 

Quel est le coût d’une opposition ?

Le coût d’une opposition varie selon l’office où est formée l’opposition:

En France, il faut compter au minimum 400 € (si l’opposition est fondée sur un seul droit) + 150 € par droit antérieur supplémentaire invoqué.

Au niveau européen, le coût est de 320 €.

Notez qu’il est préférable de passer par un conseil spécialisé pour la rédaction du mémoire d’opposition – dans ce cas, il faut prévoir des frais supplémentaires pour les honoraires.

Comment rédiger une opposition ?

On applique dans ce cas la même méthode que lors d’une recherche d’antériorités.

IMPORTANT : il est inutile d’utiliser des arguments de fait dans le mémoire d’opposition, l’examinateur n’en a que faire. Il va se contenter de comparer les marques telles que déposées. Dès lors, abandonnez les arguments de type « j’ai déposé la marque comme ça mais je l’utilise comme ci », évitez de raconter l’histoire de votre société ou les raisons pour lesquelles vous avez été scandalisé de découvrir le dépôt auquel vous vous opposez. De même, ne prenez pas la peine de raconter vos éventuels échanges d’emails avec l’adversaire, et il est tout à fait inutile de comparer votre marque ou celle de l’adversaire à d’autres marques existantes, sauf si le rapprochement apporte un argument juridique fort qui va dans votre sens et qui a un vrai lien avec votre dossier.

L’argumentaire se fait en 2 parties : comparaison des signes, puis comparaison des produits et services.

La comparaison des signes se fait sous 3 angles :

  • Comparaison visuelle : les signes se ressemblent-ils, et si oui, pourquoi ? Même nombre de lettres, mêmes préfixe ou suffixe…
  • Comparaison phonétique : les sonorités de chaque marque sont-elles identiques ou proches ?
  • Comparaison intellectuelle : les signes ont-ils le même sens, font-ils référence au même domaine, appartiennent-ils au même champ lexical ?

La comparaison des produits ou services consiste à s’interroger sur le caractère identique, similaire ou complémentaire des produits et services en cause. N’oubliez pas que des produits et des services appartenant à des classes différentes peuvent être similaires. De même, il peut y avoir une complémentarité, entre des produits et des services. Cf notre fiche sur la disponibilité pour plus de détails.

IMPORTANT : dans une opposition, la similarité et la complémentarité doivent TOUJOURS être argumentées. Ne comptez pas sur l’INPI pour se substituer à vous dans l’argumentation car il n’a pas à le faire. Si vous vous contentez de déclarer que des produits ou services sont similaires ou complémentaires sans expliquer pourquoi, vous risquez que la décision soit rendue sans tenir compte de ces produits ou services, qui resteront alors au libellé de la marque adverse.

Quelles sont les conséquences de l’opposition ?

Si l’office des marques reconnait l’opposition comme fondée, la marque est refusée à l’enregistrement en tout ou partie. Sinon, elle est enregistrée.

En France, l’opposition n’a aucune conséquence financière : le perdant ne doit rien au gagnant.

En Union Européenne, le perdant à l’opposition doit payer au gagnant une somme forfaitaire relative aux frais de procédure, mais seulement si le gagnant la réclame. Cette somme comprend le remboursement de la taxe d’opposition (320€) ainsi que 300€ de frais divers engagés par le gagnant. Aucun justificatif de ces frais n’est à apporter.

La décision de l’office est-elle contestable ?

Oui, elle est contestable.

En France, il faut cependant aller directement devant la Cour d’Appel avec tout ce que cela implique comme temps et dépenses (représentation par un avocat…).

Au niveau européen, on peut contester la décision de l’office devant la Chambre de Recours.

Je n’ai pas formé opposition dans le délai, puis-je encore contester la marque du tiers ?

Oui, mais plus sous la forme d’une opposition, puisque le délai est passé. Vous pouvez cependant former une action en nullité de marque pour atteinte à vos droits antérieurs. Cette action peut être faite devant l’INPI ou l’EUIPO, mais il s’agit d’une procédure plus complexe et plus coûteuse qu’une opposition.

Il est donc recommandé de surveiller vos marques afin d’être informé dès la publication, et pouvoir réagir à temps, avant la fin du délai d’opposition.


Tags

conflit, EUIPO, INPI, opposition, surveillance


You may also like